Retour courses 2015

Présentation course

Le dossier complet

 

Episode VII
L'étape 4 dite "La longue" - 92,0km

Mercredi 8 avril 2015, calendrier local 5h00 GMT

Je ne sais pas si c'est un effet mécanique liée à l'heure de départ qui est un peu plus tôt ce matin, mais mon horloge interne s'est également décalée.

Pour beaucoup cette journée s'annonce comme "la" journée de tous les dangers. Pour d'autres comme moi, c'est probablement la journée qu'on attend. En tous cas quelque chose me dit que c'est ma journée, simplement parce qu'elle est longue et que je suis beaucoup plus à l'aise avec les épreuves longues en non stop plutôt qu'avec des épreuves de 40km.

Je ne change absolument rien à mon protocole matinal. Réveil, Petit déjeuner, Muesli, crackers, supradyn et café, récupération de l'eau, toilette, préparation et rangement du sac.

Concernant le sac, vue la longueur de la longueur de l'étape et mon mode de progression, je décide de modifier un peu mon organisation.

A l'origine, j'avais prévu de faire l'étape en me ravitaillant exactement comme pour les autres étapes, mais ça, c'était avant ! J'ai juste le double de tout en quantité (4 doses de poudre au lieu de 2,... et j'ai ajouté un crumble à manger au PC3 histoire de renforcer un peu l'alimentation avec un peu de solide. Ensuite ce sera un go non stop jusqu'à l'arrivée.

Au tout début j'avais prévu une collation d'arrivée, mais comme je marche et que je vais moins vite que ce que j'avais prévu, j'arriverai probablement en fin de nuit ou début de matinée et cette collation prévue pour une arrivée en début de nuit n'est plus utile. J'ai donc mis de côté la crème caramel prévue pour un usage ultérieur éventuel.

Le sac s'est encore allégé. J'ai placé la moitié de mon ravito dans les poches latérales, et le reste est dans le sac à dos. Je le prendrai à la mi-course au PC4.

En dehors de la distance, il y a une autre particularité sur l'étape. Les 50 premiers du classement général partiront 3 heures après nous, ce qui nous permettra de les voir passer. Du coup ils ont le droit à 3 heures de sommeil de plus. Avis aux marmottes !

Tout le reste de la période d'avant course se déroule comme d'habitude, même si on sent quand même une certaine angoisse chez pas mal de concurrents. En discutant avec quelques uns, je me rends compte que beaucoup d'entre eux n'ont jamais dépassé les 50km non stop, d'où cette appréhension. Attention, même en étant habitué aux épreuves longues, 92km, ça reste 92km, surtout vues les conditions dans lesquelles on va courir (ou marcher). Le plus gros risque est de banaliser cette distance sous prétexte qu'elle n'est qu'à deux chiffres. C'est vrai qu'on est nombreux à avoir rêvé d'un 100km pour les 30 ans !

Direction la zone de départ en ordre toujours aussi dispersé mais surtout sous un vent qui ne vas pas nous laisser tranquille.

Anniversaires, 1258 partants, 72 abandons depuis le départ, consignes de course. On apprend ainsi que cette année il n'y aura pas le traditionnel laser vert qu'on pouvait voir à 2 CP de distance. 0 la place on aura le droit à une surprise au CP5, mais Patrick ne veut rien dire de plus. Cachotier !

Donc l'étape du jour est donnée pour 91,7 km à couvrir en moins de 36 heures avec pas moins de 7 CP et la re-traversée du fameux jebel El Otfal mais dans l'autre sens aujourd'hui. Il y a aussi des barrières horaires intermédiaires aux CP à partir de CP3. La barrière à CP3 est positionnée à 11h30 de course alors que les jours précédents j'ai toujours mis moins de 8h00. Je vais gérer l'étape comme j'ai l'habitude de le faire sur le très long. CP par CP, jamais globalement. Je prends un CP, je le bouffe puis je passe au suivant. Peu importe combien il en reste avant l'arrivée.

AC/DC, Highway to hell, airspeeder, la foule des chevaliers qui s'élancent. Etrangement, ça part beaucoup moins vite aujourd'hui. Effet conjugué d'un départ prudent, mais aussi de l'absence des 50 premiers.

Départ - 8h13 GMT

Depuis le temps que j'entends parler de cette "longue", et bien j'y suis, et pour un bon moment. pas de stress au départ. Je me lance à la même allure que d'habitude sachant que ma force réside dans ma régularité. Etrangement au bout de 500, vous savez ce qu'il se passe ? Et bien non ! aujourd'hui pas de Bert' en vue. Je ne sais pas s'il est devant ou derrière, donc je conserve mon petit rythme.

Très rapidement on se prend une première montée sablonneuse, suivi d'une descente qui ne l'est pas moins. Au moins on est tout de suite dans le bain.

En fait ce premier CP va alterner zones de sable et zones caillouteuses. Pas difficile mais pas roulant non plus. Un peu usant, ce qui en début de "longue" peut provoquer des dégats.

Les kilomètres s'enchaînent au rythme habituel jusqu'à CP1

CP1 - 12,2 km - 10h33 GMT - 2h20 de course

Là encore je n'innove pas vraiment. Eau, ravito, pause courte et... ça repart

J'ai l'impression que c'est une habitude côté organisation, mais systématiquement, derrière les ravitos on a une difficulté. Pour faire simple c'est souvent une côte et du sable mou.

Cette sortie de CP n'échappe pas à la règle. Une petite passe avec pas mal de sable puis un second passage sur un petit sommet ensablé avant descendre vers un lac asséché.

La traversée d'un lac asséchée est quelque chose que j'aime bien. J'ai le souvenir du lac Iriki lors de la Trans 333 avec ses kilomètres à perte de vue sans le moindre relief. Ici la traversée sera plus courte, environ 3 à 4 kilomètres, mais le fait de marcher sur ce sol craquelé est assez sympa.

La passe de El Maharch est une véritable faille entre deux jebels.

Un peu de sable mais globalement il suffit de suivre une piste qui permet de pas trop mal dérouler. Passage près de quelques constructions, et même d'une vraie auberge, ouverte. Mais pas question de s'y arrêter. Elle est surveillée de près par des membres de l'organisations des fois qu'on se laisse tenter par une petite bière glacée ! Ensuite on retrouve la grande plaine au milieu de laquelle était installé le bivouac de la seconde étape, celle des superbes jebels. On reste maintenant sur un terrain caillouteux jusqu'au CP2

CP2 - 26,0 km - 13h16 GMT - 5h03 de course

Bip fait la balise lors du franchissement de la ligne. Ca fait chaud... Heureusement qu'il y a de l'air la plupart du temps car pendant un moment lors de la traversée du lac asséché, quand on s'est retrouvé sans vent, on a tout de suite senti que ça tapait fort.

CP, eau, ravito, pause courte, habituelle. En m'installant contre un 4x4 j'accroche mes lunettes à la portière du véhicule. Je déroule mon protocole de ravitaillement puis je file à la tente des docs pour récupérer un peu de vaseline pour mettre entre les cuisses (ça commence à chauffer un peu et j'ai oublié de mettre de la NOK ce matin). Au moment de repartir je me rends compte que je n'ai plus mes lunettes de soleil. M... Je retourne au 4x4 mais impossible de remettre la main dessus. Je demande aux bénévole qui sont là mais personne ne leur en a apporté une paire. Tant pis. Ca va être chiant mais je vais devoir continuer sans lunettes de soleil !
Redemarrage...

A ce moment, je sais exactement où je suis. Face à moi, j'ai un cordon de dunes puis le jebel El Otfal. Souvenez-vous, le gros jebel de l'étape 2, et bien on va le faire mais dans l'autre sens. Mais avant ça on a un gros kilomètre de dunes, histoire de bien nous ruiner les jambes.

Une fois de l'autre côté des dunes je me dirige vers le début de la passe qui va nous faire monter le jebel quand je retrouve Bert'. On fait le bout de chemin ensemble, tout en laissant passer les premiers qui viennent de nous rattraper. Cela nous permet de voir passer Laurence, Christophe et Antoine qui nous doublent avec une étrange facilité.

Avec Bert', on arrive au début de la montée, ou si vous préférez, à la fin de la descente de la seconde étape. Quand on a descendu ça il y a deux jours, je me suis dit que ça allait être un enfer à remonter, surtout avec la chaleur qui nous plombe à cette heure-ci. Mais bon n'y a pas trop de questions à se poser puisque de toute façon il faut monter. Je me lance dans la gorge, et rapidement j'attaque la montée des grandes plaques de pierre. Finalement je trouve assez facilement les endroits par ou passer sans avoir besoin de monter de trop hautes marches. Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est facile, tant j'ai horreur des montées, mais par rapport à ce que je m'étais imaginé, je trouve que ça passe plutôt bien.

Bert' suis derrière mais a un peu de mal sur cette section. On reste au contact ensemble, mais il fait moins le kéké que lors de la descente...

Au fil de la progression je vois apparaître la fin de la gorge. On va devoir finir maintenant par un passage dans la rocaille. Cette fois-ci c'est moi qui coince un peu. Bert' en profite lâchement pour me repasser devant. Je fais une pause de quelques secondes sous le seul arbre maigrichon qui se trouve là et je repars.

Je retrouve Bert au sommet du jebel. C'est bon on l'a mangé. Ici on est au soleil, mais il y a de l'air... Et même du vent !

Je découvre à ce moment-là la descente qui nous attend. En effet on ne vas pas redescendre le long de la dune de sable par où on est passé à l'aller, mais cette fois on a le droit à la plus grande descente de dune que j'ai eu l'occasion de faire. Juste impressionnante avec une pente à plus de 20%

Sur cette photo, en orange la montée telle que nous l'avons faite lors de l'étape 2, et en bleu la descente telle que nous allons la faire aujourd'hui.

Le temps de boire un coup, de retrouver mon souffle et zou c'est parti... Je descends exactement comme si j'étais dans la neige. De grandes enjambées avec un pas glissant qui me fait faire 10 mètres à chaque fois. Je ne sais pas exactement combien de temps j'ai mis, mais franchement on doit être de l'ordre de 45mn de montée pour 2mn de descente... Joli négative split !

La fin de la descente est assez dangereuse car le sable se mélange à de gros cailloux. Ce sera d'ailleurs fatal à un participant dont la chute sera immortalisée par Ian Corless présent à ce moment là. Mais on en reparlera plus tard.

La fin du CP reprend les traditionnels terrains de terre, cailloux et un peu de sable.

Passage sur le tapis du CP... Biippppp libérateur.

CP3 - 37,8 km - 15h58 GMT - 7h45 de course

Je récupère mes deux bouteilles d'eau, et le bâton lumineux que je devrais attacher sur mon sac à dos à la nuit tombée. Pour une fois au lieu de me limiter à mon protocole de ravitaillement classique, je décide de me poser quelques minutes pour prendre un ravitaillement un peu plus copieux. En effet, beaucoup de coureurs ont prévus de faire une pause au CP4 (moitié de la course en CP) ou CP5 (pendant la nuit). Pour ma part je préfère couper 2 fois mais de façon plus légère.

L'arrêt au CP3 correspond à peu près à la longueur des étapes des jours précédents. Donc je me suis habitué à me ravitailler à ce moment là. De plus, les tentes sous lesquelles on peut se poser ne sont pas encore trop remplies ce qui est plus agréable. Je prévois de ne pas faire d'arrêt au CP4, puis de refaire une courte pause à CP5 avant de me lancer dans un nouveau non stop sur la fin.

Direction les tentes coureurs. En plus de mon protocole habituel, je décide de me faire le plat prévu pour l'occasion, à savoir un crumble pomme-banane. Je le fait volontairement plus liquide de façon à le transformer en sorte de compote. Au final le mélange entre la texture liquide de la compote et les morceaux de crumble s'avère excellent.

Vue l'heure, je me donne jusqu'à CP4 avant de passer en mode nuit. On verra si je tiens l'objectif.

Avant de repartir je fais un saut à la tente medicale pour récupérer ma dose de vaseline. Je me lave les mains, je réajuste l'équipement et hop, c'est reparti.

Cette fois la température a baissée mais le vent est assez fort par moment, et surtout il fait voler le sable, et sans lunettes de soleil c'est pas terrible, surtout avec les lentilles.

La jonction jusqu'au CP suivant est assez classique. Terre, sol dur, cailloux, parfois un peu de sable, un passage à proximité de ruines et d'un cimetière à mi-chemin. La progression est assez aisée d'autant que mon ravitaillement m'a bien reboosté.

Je surveille la tombée du jour. Le soleil est couché depuis un moment et la lumière décline tranquillement jusqu'au moment où je passe le tapis du CP4

CP4 - 50,2 km - ??h?? GMT - ?h?? de course

Ben oui. Je n'ai jamais regardé ma montre pendant toute la course. Les temps que je reprends sont ceux publiés par l'organisation, mais là il en manque. En tous cas je suis arrivé avec la nuit à CP4.

Je récupère mes bouteilles d'eau, je me ravitaille comme d'habitude, je sors la frontale du sac à dos et je positionne le bâton lumineux dans la poche du sac après l'avoir activé.

Comme prévu, beaucoup de gens sont arrêtés ici. Avec la nuit plus besoin de se serrer sous les tentes pour être à l'ombre. Le plus bizarre (pour moi) c'est de voir le nombre de coureurs qui font des feux pour manger chaud ! Comme si on ne pouvait pas tenir 20 ou 24heures uniquement avec du froid ?

Je les laisse à leur pose diner (mais ils ont dû se dire la même chose quand je mangeais à CP3) et je pars sur ma première section de nuit.

Là tout change. Alors que je m'attendais a avoir une vraie belle luminosité grâce à la lune, et bien c'est rapidement le noir complet. Pas de lune, pas de lumière, rien, nada !

Du coup, non seulement il faut s'appuyer sur le balisage de nuit de la course, mais surtout on ne peut rien anticiper du tout surtout il n'est pas possible de contourner les petites dunes ou autres difficultés.

Le balisage de nuit se limite à la pose de bâtons lumineux sur les panneaux habituels. Comme ils sont éloignés ils sont parfois limites à voir au loin, mais avec le ruban formé par les bâtons placés dans le dos des coureurs, on a rapidement une idée du tracé.

Ma progression va rapidement devenir difficile. Si les tout premiers kilomètres étaient juste caillouteux, on est maintenant dans le sable mou. Le road book a beau parler d'entrée, de sortie de dune, de cailloux, ... sur le terrain, je suis entièrement dans le sable et dans les dunes. Pire, j'ai l'impression que je ne fais que monter. Je monte des dunes en permanence, mais je ne redescends jamais. C'est long, c'est dur (ou plutôt mou). Je vais attaquer la période la plus pénible de la course depuis le départ. Dans le sable on n'avance pas, et la nuit n'arrange rien. Si on ajoute le vent qui souffle presque en continue maintenant ca devient vraiment galère.

Pour tout arranger j'ai un gros coup de mou, et du coup les idées noires qui vont avec. Mais qu'est-ce que je fous là. Au prochain CP j'arrête. J'ai rien a prouver, je rentre à la maison. J'en ai marre. Je ceci, je cela.

Et c'est là que l'expérience va encore payer. Je ne cherche pas a chasser ces idées noires (je n'y arriverai pas), mais je vais me contenter de les gérer. Je passe encore une fois le cerveau en mode OFF et je me contente d'avancer. Peu importe l'allure, peu importe le temps que je mettrai, je dois avancer et ne penser à rien d'autre. J'ai l'impression que ça dure des heures et des heures. Je ne sors jamais de ces foutues dunes. Régulièrement je me prends une claque de sable avec le vent et je râle.

Les coureurs se sont espacés et il est parfois compliqué de suivre la trace. J'essaye de rester concentrer vers le moindre point lumineux vert que je peux entrevoir.

Avec beaucoup d'humour, le road book indique un point de vue panoramique... Peut-être que si j'avais été bon, je l'aurais découvert... Peut-être.

A force de persévérance je retrouve une piste moins ensablée. Quel bonheur. Reste juste à trouve le CP, hors derrière un gros mouvement rocheux, on devine une aura lumineuse. Ici en plein désert, pas de doute ça ne peut être que le CP, mais il n'est pas tout proche. Le fait d'avoir retrouvé un sol avec un peu d'appuis me redonne le moral. Je pousse sur les bâtons pour essayer de reprendre le rythme.

Plus je me rapproche plus la lumière devient forte, puis à un moment j'ai même l'impression d'entendre de la musique... Et si ce n'était pas une impression.

Comme souvent le CP est positionné de façon à ce qu'on ne le découvre qu'au dernier moment. Et là quand j'arrive je vois la rangée de 4x4 totalement éclairée par de gros ballons et par une myriade de cônes lumineux posés au sol. Après la galère sur ce CP, c'en est presque magique !

CP5 - 63,3 km - ??h?? GMT - ?h?? de course

J'arrive finalement sur le tapis magique. Biipppppp. Et là je comprends pourquoi j'entendais de la musique. Il y a un orchestre qui joue sur place pour accueillir les concurrents. Pt@/n que c'est bon !

Je vais jusqu'à la bonne file, les bénévoles me demandent si ça va et je leur dit que si le traceur me tombe sous la main, je suis prêt à lui arracher la jambe gauche avec les dents, ce qui les fait marrer. Mais c'est que je ne plaisantais pas moi !

Je passe le ruban des 4x4 du ravito, bien décidé à aller me poser un peu et là je découvre la fameuse surprise dont nous avait parlé Patrick. Je pensais que la surprise c'était l'illumination et l'orchestre. Et bien non. Figurez-vous que derrière les 4x4, ils ont reconstitué un bar de plage (mais ici la plage est très grande... C'est la mer qui est loin). Chaises longues, bar à thé aux couleurs chatoyantes, musique, bref la fête.

Au moment où j'arrive, je vous rappelle que je suis explosé, un concurrent s'en va laissant une chaise longue libre. Ni une ni deux, je saute dedans. Je ne sais pas si je pourrais en sortir, mais qu'est-ce que j'y suis bien. Le temps de reprendre mes esprits et j'ai la surprise de voir sur les 2 chaises longues juste devant moi Gloria et Yves.
"- Ben qu'est-ce que vous faites là ?
- on se repose. Et toi
- moi j'arrive juste. Je suis explosé
- va au bar ils distribuent du thé"

Merci Gloria. J'avais vu le bar mais pas le thé. Je m'extrais de ma chaise longue, et je vais chercher ma tasse de thé chaud et sucré. Je le déguste dans ma chaise longue après l'avoir orientée dos au vent car ça souffle fort ici et il commence à faire frais. Je sors ma veste de tyvek que j'enfile et je regarde ce que j'ai à manger. En fait j'ai faim. Mon ravitaillement a été minimaliste et je risque de le payer. Comme je ne serai probablement pas rentré avant le lever du jour, cela veut dire que je dormirai demain matin, et que donc je peux prendre tout de suite mon petit déjeuner... Bonne idée

Me voilà à farfouiller dans mon sac pour sortir le muesli. Je l'allonge un peu pour mieux me réhydrater, et je mange ça avec délectation. Ca ma fait rapidement un bien fou. J'en profite pour controler les babioles qui me restent. Un peu de viande séchée. Un peu d'ananas. Pas grand chose mais d'un autre côté je n'ai plus que 2 CP 1/2 d'ici l'arrivée !

Je traine un peu tellement je suis bien, mais je me fais à l'idée de devoir repartir. En tous cas cette pause m'a bien redonné du jus. Je suis arrivé dans le rouge mais je repars dans le vert. Comme quoi même quand le moral est au plus bas il faut persévérer.

Je me rhabille, je conserve ma veste en tyvek à cause du vent très fort, je passe chez les docs chercher ma vaseline, j'enfile le sac et je laisse derrière moi le bar de plage

[Mode des top et des flops ON]
TOP : Le bar de plage, l'ambiance de fête et la tasse de thé. A la différence du laser des années précédentes, là il s'agit d'une surprise qui a reboosté plus d'un coureur !
[Mode des top et des flops OFF]

Zou c'est reparti. Par contre à peine quelques centaines de mètres plus loin et me revoilà dans le sable. Ca recommence !

Je vais vous la faire courte cette fois-ci, mais les 1à km qui vont suivre ce sera des dunes, des dunes et encore des dunes. La différence c'est que le moral est revenu. J'en bave, c'est long, c'est dur, mais je n'ai plus d'idées noires. J'avance.

Par moment le vent qui est passé de fort à violent projette de telles quantités de sable que je suis obligé de m'arrêter et de me retourner. Les passages sur certaines cretes sont un enfer, d'autant que comme sur le CP précédent, on ne fait que monter...

Sable encore, sable toujours... je ne m'occupe de rien jusqu'à ce que je retrouve Bert' un peu avant l'arrivée au CP6.

Tapis, Biippppp

CP6 - 74,8 km - 01h15 GMT - 17h02 de course

2 CP entier de dunes... Le truc qui tue. Ici il y a un nombre impressionnant de coureurs qui dorment par terre. Je n'ai pas fait attention à ça au CP5 trop pris par ma reconstitution physique, mais ici ça me surprend.

Je me ravitaille en mode light. De toute façon je n'ai plus grand chose en stock. Passage chez les docs, reprise de la tenue. Je ne veux pas m'arrêter trop longtemps. Je dois faire le CP à venir et ensuite il ne me restera qu'un demi-CP pour l'arrivée.

On repart ensemble avec Bert' mais après quelques kilomètres il décroche alors que je suis dans une phase où je me sens super bien et pendant laquelle je retrouve un bon rythme.

Il y a bien un peu de sable, mais franchement par rapport à ce qu'on a eu sur les 2 CP précédents, c'est de la broutille. Une bonne partie de la progression se fait sur une piste, et là avec les bâtons je suis bien et j'en profite. J'ai repris un bon rythme, et je remonte pas mal de monde.

C'est comme ça que je passe Gloria et Yves. On s'était revu plusieurs fois depuis CP5 mais comme je n'ai jamais pu les accrocher. Là je reste quelques instants avec eux, mais je préfère profiter de ma forme momentanée pour gagner quelques kilomètres. Du coup je me retrouve à nouveau tout seul, avec juste le tac tac des bâtons sur un vrai sol redevenu dur !

Le CP je ne l'ai pas vu venir.

CP7 - 85,7 km - 03h44 GMT - 19h31 de course

2h30 entre l'entrée de CP6 et celle de CP7. Pas trop catastrophique vues les circonstances. 4x4, eau, protocole allégé. En fait depuis CP6 j'ai un problème, c'est que je ne peux plus rien boire. J'ai vidé le peu de poudre qu'il me restait, mais même l'eau ne passe plus. Je me sers de la bouteille uniquement pour me rincer le visage et les mains, mais pour l'hydratation, ça bloque. En fait je ne vais plus rien boire jusqu'à l'arrivée !

Je passe voir encore une fois les docs pour la vaseline et je pars aussitôt. 6km et je vais me coucher. Cette tente, j'en rêve maintenant.

Plus trop de souvenirs de cette section si ce n'est un long passage sur une piste ensablée assez usante. Après 90km, tout devient usant de toute façon. Le final me fait naviguer entre des buissons. Je n'arrive même plus à lire le tracé. Je fais un petit bout avec une concurrente, mais en voyant au loin les lumières du bivouac, elle décide de finir en courant.

Elle est longue cette section. Je la vois l'arrivée, mais elle ne veut pas s'approcher. Je continue, je ne lâche rien, je m'approche, je m'accroche, j'ai envie d'aller me coucher.

Dernières centaines de mètres, forte lumière, guirlandes lumineuses, l'arche qui gigote dangereusement avec le vent qui lui n'a pas baissé d'intensité, les encouragements des bénévoles présents et le BIIPPPPPPP libérateur du passage de la ligne !

Yes, c'est fait

Arrivée - 91,2 km - 05h11 GMT - 20h57 de course

Je passe devant la webcam au cas où, mais je me doute qu'à cette heure la, tout le monde est au lit. On m'annonce 620. Soit pratiquement 200 places de mieux que les jours précédents ! Je sais que plus c'est long, plus l'épreuve est faite pour moi. Je ne suis pas rapide, mais ma vitesse diminue peu avec la durée, donc lorsque les autres lèvent le pied, là je repasse devant , et aujourd'hui je termine avec plus de 15 heures d'avance sur la barrière horaire fixée à 36 heures

Passage au thé, qui sera encore meilleur que les autres jours, puis je vais récupérer mes bouteilles d'eau avant d'aller rejoindre la tente.

En traversant le campement, je suis surpris de voir la moitié des tentes écroulées et l'autre moitié avec des formes étranges. Visiblement la tempête a fait des dégats. De plus, beaucoup de tentes sont pratiquement vides. Je vais jusqu'à la notre en me demandant combien de chevaliers Bled Runners seront là. En fait à part LePhil, tous les autres devraient être derrière puisque j'ai doublé Gloria et Yves tout à l'heure et que je ne les ai pas vu repasser.

J'arrive à la tente, et là surprise... personne ! Bon enfin je dis la tente mais c'est une demi tente debout avec un tapis à moitié enroulé et couvert de sable. Quel bordel. Moi qui pensait dérouler mon tapi et me coucher c'est loupé. Il y a des chances que LePhil en voyant le bazar ait décidé de dormir dans la tente de Guizmo et de ses potes puisqu'ils avaient prévu de courir ensemble. On verra ca demain matin.

J'essaye de remettre la tente dans un état opérationnel en me disant que les autres seront contents de pouvoir s'installer direct en arrivant. Je fais ça tant bien que mal, puis je déroule le tapis, je sors le duvet, je me déshabille rapidement et je me couche. Pas de protocole d'arrivée ni rien, juste m'allonger à l'abri de ce pµt@/n de vent.

Etrangement je n'arrive pas à m'endormir. Je me détends je somnole jusqu'à l'arrivée de Gloria et de Yves. Je prolonge ma récupération en attendant des news de Steph et de maître Guy.

Vers 8h00 je décide de me bouger un peu. Pas envie de dormir, donc je sais que dans ces conditions là il faut attendre que ça vienne tout seul. Je Prends ma crème caramel prévue initialement comme collation d'arrivée (n'oubliez pas, j'ai mangé le petit déjeuner au CP5) et quez j'avais mise de côté, je prépare mon eau gazeuse, puis je décide de terminer de me changer et surtout d'aller me laver un peu.

C'est à peu près par là que Stephane débarque me semble t-il. Il est explosé de chez explosé, mais il est passé en à peine plus de 24h. Top. Il nous manque toujours maître Guy, et pas de news de LePhil.

Je vais faire un tour u côté de la ligne d'arrivée voir ce qu'il se passe et j'en profite pour regarder les heures de début d'envoi des emails et des podologues. J'ai une journée complète de récup rien que pour moi, donc j'aurais le temps de faire tout ça.

Les Podos seront les premiers que j'irai voir. Après la longue pratiquement tout le monde y va et les heures d'attente s'enchainent. Ils ont mis en place une distribution de tickets avec des numéros (comme à la sécu) ce qui fait qu'on est certain de passer dans l'ordre.

[Mode des top et des flops ON]
TOP : Le mode de gestion de la file d'attente chez les docs. Pas de stress et on peut estimer son heure de passage et aller faire autre chose entre temps !!
[Mode des top et des flops OFF]

Je récupère le ticket 49... Autant dire que je serai dans les premiers à passer. Je vais au poste de nettoyage des pieds, j'enlève tous mes pansements et mes protections et je lave ça à la bétadine. Mes 2 petites ampoules aux orteils se sont stabilisées mais j'en ai une belle sur le coté du talon. Une vraie de vraie ! Je passe après environ 45mn d'attente, et là, comme la fois précédente, je me retrouve avec un podo super sympa qui traite ça aux petits oignons. Il me fourni même tout ce qu'il faudra pour refaire des protections avant l'étape marathon de demain, mais me conseille d'ici là de laisser mes pieds respirer.
Cool, merci m'siou !

Je repasse par la tente et là maître Guy est arrivé. Bonne nouvelle. La tente est pratiquement au complet sauf qu'on va avoir une mauvaise nouvelle. Le Phil n'est pas parti dormir dans la tente de Guizmo. C'est lui le fameux coureur qui a fait une grosse chute dans la descente du jebel avant le CP3, et on parle d'une cheville cassée et donc d'un arrêt forcé. La poisse continue sur les chevaliers Bled runners. Après les abandons de Foued et Willy, gros coup au moral dans la tente !

Je profite de la suite de la matinée pour faire le tour des tentes. Du côté de la seconde tente de chevaliers Trailers, tout le monde est rentré. On découvrira plus tard (en lisant les classements détaillés) qu'en fait Bert' a fini à peine à 3 minutes derrière moi cette nuit ! Et je ne l'ai même pas vu dans la zone d'arrivée. Comme quoi j'étais un peu décalqué quand même.

Je passe aux emails histoire de rassurer tout le monde et de donner des nouvelles puis je reviens à la tente pour faire mon repas du midi. Récupération rime avec alimentation. Purée au jambon, compote de poire, crackers, eau gazeuse et café... Royal quoi !

L'après midi va se dérouler entre phase de repos dans la tente et ballade sur le bivouac à refaire des bouts d'étape avec tout le monde. Comme j'ai récupéré 3 bouteilles d'eau supplémentaires, je décide d'en sacrifier une pour me faire une douche. Oui vous avez bien entendu, une douche !

Je m'éloigne un peu du bivouac. En fait je me retrouve dans une ligne d'une quinzaine de mec et de filles à poil en train de se laver dans le désert ! Je fais des trous dans le bouchon, de la bouteille, et c'est parti pour une micro douche avec mon bout de savon et mon gant pré imprégné. Je n'avais jamais imaginé pouvoir prendre une douche avec seulement un litre d'eau, et bien c'est possible, et si vous saviez quel bien ça fait !

Dans l'après midi on apprend, un peu accidentellement, qu'il y a une distribution de coca frais et de patisseries marocaines. Le temps d'y aller et j'attrape les derniers gateaux. Je rapporte les canettes à mes équipiers de tente. Mais bon sang, pourquoi ne pas communiquer ce genre de choses sur le bivouac. Ce n'est quand même pas difficile !

[Mode des top et des flops ON]
TOP : Le ravito coca frais / gâteaux dans l'après midi !
[Mode des top et des flops OFF]

[Mode des top et des flops ON]
FLOP : L'information qui n'a pas circulée sur le bivouac ! Si c'était la seule fois, je ne dirais rien mais globalement toute le mode d'information aux coureurs sur le bivouac est à ré-étudier.
[Mode des top et des flops OFF]

En fin de journée grosse animation sur la ligne d'arrivée. Les coureurs viennent attendre l'arrivée des derniers ! Une tradition sur la longue, même si cette année beaucoup ont préféré rester sous leur tente !

Le jour décline, le vent est toujours aussi fort, et je m'organise au mieux pour mon diner. Noix de cajou, pates carbonara avec parmesan et riz au lait. Une fois tout ça avalé, je suis bien calé.

Je m'installe le plus confortablement possible en essayant de me protéger du vent le mieux possible et je me lance dans une nouvelle nuit que j'espère récupératrice



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